Il est toujours difficile de se présenter sans avoir la désagréable impression de se vendre.

Vincent Mons, notre cher camarade ingénieur du son, a dit un jour de nous : « Le projet révolutionnaire de L’Armée des Romantiques peut ainsi se comprendre, dans une puissante simplicité, par le souhait de dire quelque chose sur la société, invoquant le réel de l’aujourd’hui et de l’humain ».

Cette phrase, nous pouvons l’entendre dans l’épisode 9 des « Podcasts de L’Armée des Romantiques ». Elle pourrait en déstabiliser plus d’un tant il est peu habituel qu’un ensemble de musique classique puisse évoquer la vie de la cité et prétendre y prendre part en l’analysant sous l’angle de la production matérielle et économique.

Mais d’ailleurs, est-ce le rôle des artistes que de s’occuper de politique ? Poser la question c’est pour nous évidement y répondre.

Nous devons être conscient que l’artiste n’est pas un être hors-sol et qu’il n’échappe donc pas aux enjeux des conditions matérielles. Nous considérons qu’il ne doit aucunement se placer au delà des réalités du champ social. Il a ainsi le devoir de se revendiquer en tant que travailleur de la culture.

L’artiste est associé à tort ou à raison à la notion de liberté, et cela ne date pas d’hier. Mais comment imaginer pouvoir créer librement sur le plan artistique tout en faisant le constat de l’état de subordination qui règne dans le milieu de la musique classique ?

Appeler aujourd’hui à une souveraineté dans le travail comme condition préalable nécessaire à tout acte de création nous invite à ouvrir les yeux sur les structures de domination qui financent le milieu musical classique : mécénat et marché public des subventions. Si nous savons faire la différence entre ces deux systèmes, nous savons également que les artistes n’ont aucun pouvoir décisionnel au sein des structures qui les régissent.

Comment débattre sereinement entre nous des enjeux esthétiques de l’art si notre survie économique dépend de ce que nous faisons et non de ce que nous sommes ? C’est en cela que L’Armée des Romantiques, qui souhaite de tout coeur provoquer des débats esthétiques et faire bouger les lignes (« jouer la musique » & « parler de musique »), n’hésite pas à reprendre à son compte la phrase de Baudelaire :

« Parler d’art d’une façon partiale, passionnée, et politique » . Mais que fait donc l’Armée des Romantiques ?

L’Armée des Romantiques est un ensemble musical basé à Marseille. Son champ d’expression est la musique classique ou plus précisément la musique romantique jouée sur instruments historiques. Elle mène une analyse profonde sur l’esthétique romantique qui est aujourd’hui masquée par celle du néoclassicisme.

Son activité ne se limite pas aux concerts et aux disques. Sur ce site vous aurez accès gratuitement à tout ce que nous produisons : des podcasts, des vidéos, des enregistrements, des articles. Cet acte de gratuité nous a semblé la seule manière de produire librement, sans avoir à quémander sur le marché actuel de la musique pour qu’un producteur accepte de monnayer nos créations, pas plus qu’à alimenter la rente capitaliste des plateformes « collaboratives » (comme cela est devenu la norme aujourd’hui).

Et cette production à un coût !

Si vous considérez que cet acte de résistance participe à la vie artistique et si vous souhaitez ainsi voir, entendre et lire d’autres productions de L’Armée des Romantiques, vous pouvez nous soutenir financièrement en faisant un don. La sécurité sociale de la culture n’étant pas encore mise à l’ordre du jour (même si nous l’appelons de tous nos voeux et nous y travaillons collectivement au sein d’une autre structure), le financement direct par un public conscient des enjeux vertueux de la culture et des arts pour notre société, nous apparaît comme la seule alternative économique à court et moyen termes.

La question politique étant posée, qui sommes-nous ? Quel est l’ADN de l’AdR ?

Manu

C’est sous la bannière iconoclaste de L'Armée des Romantiques que se sont rassemblés des compagnons fidèles tels que la mezzo contre-alto Lucie Roche, le violoniste Girolamo Bottiglieri le violoncelliste Emmanuel Balssa, l’altiste Caroline Cohen-Adad, le pianiste Rémy Cardinale et l’ingénieur du son Vincent Mons. Cette armée bien singulière a pour ambition de réinterpréter les chefs d’œuvres de la musique de chambre du XIXe siècle sur instruments historiques, en positionnant cette musique novatrice dans le contexte intellectuel et artistique de l’époque.

Les programmes des concerts de l’Armée des Romantiques visent à restituer l’atmosphère d’effervescence, de découverte et les débats passionnés qui animèrent tout le XIXe siècle. Dans cet esprit, le concert donne lieu à des commentaires et des explications par les interprètes sur le contexte historique, les partitions et les instruments, favorisant une écoute instruite entre les musiciens et le public.

L’Armée des Romantiques affirme son engagement pour l’interprétation sur instruments historiques qui s’avère être la seule réponse crédible pour rendre la modernité des œuvres jouées. Notre pratique régulière des instruments anciens nous amène à nous interroger sur l’héritage transmis par le XXème siècle. Leurs sonorités, leurs couleurs, leurs dynamiques, bousculent nos propres habitudes et certitudes sur l’interprétation des œuvres. Ce nouveau prisme sonore qu’offrent les instruments anciens, réactive notre écoute, bouleverse nos attentes et redonne une nouvelle jeunesse à un répertoire parfois figé dans le temps.

L'Armée des Romantiques est convaincue de l'importance qu'il y a de donner un autre sens à notre art. Les dérives actuelles que sont l'ultra médiatisation, le culte de la personnalité, la logique des modes, sont autant d'artifices qui nous empêchent de repenser l'art d'une manière sereine.

La subversion à laquelle nous appelons passe concrètement par une autre façon d’aborder le concert et l’enregistrement, rendant l’écoute plus joviale, plus passionnée, plus active, plus réfléchie.

Gageons que notre envie rende notre art un peu plus désirable pour le plus grand nombre.